Itw Ambre Godillon : "Le PSG a les armes"

Publié le : 16/12/2017 - 00:33

Journaliste pour Yahoo, Canal+ et Infosport+, Ambre Godillon a gentiment accepté d'évoquer l'actualité du PSG en répondant à nos questions. Un entretien sans détours et avec beaucoup d'amour pour le PSG et un certain Javier...

Pour commencer sur l'actualité la plus fraîche, quel sentiment as-tu sur le tirage de LDC ?

Ambre Godillon : On a tiré l’épouvantail de ce chapeau 2. Quand on voit le tirage du Bayern, ça fait relativiser cette première place… Le problème, c’est qu’on ne peut pas juger à un instant T le Real Madrid et le PSG. Le PSG a fait un parcours quasi-irréprochable en LDC alors que le Real n’a pas montré le meilleur visage en Liga et LDC. Après, il ne faut pas se leurrer, le Real est la meilleure équipe sur phase éliminatoire et l’expérience dont le PSG manque. Tout est possible sur 2 matchs, le PSG a les armes, j’ai envie d’y croire.

Qu'est-ce qui fera la différence pour passer ce tour ?

A.G : Le mental. Je ne vais pas être très originale mais c’est ce qui manque. Sur le papier, le PSG a tout pour être la meilleure équipe d’Europe, un collectif soudé, des références à chaque poste. Mais on a l’impression que c’est dans l’ADN du club de jouer avec de la nervosité lorsqu’il est attendu. Le PSG a 2 mois pour se préparer, s’il n’y a pas de faille mentale et qu’il est 100% dans l’engagement, sur le terrain il y a match. Ensuite, il y a des choses qu’il n’avait pas, comme un top 3 mondial par exemple. Certes, un match comme ça ne se gagne pas qu’avec des individualités, mais Neymar, Cavani, Mbappé peuvent faire la différence. Alves aussi apporte son mental, c’est ce qui nous a manqué les années précédentes. Ces individualités additionnées les unes aux autres peuvent faire la différence. Pour moi, le pire ennemi du PSG, c'est lui-même.

Et espérer ne pas être plombé par les blessures…

A.G : Aussi ! Tous les ans, il y a quelque chose… Déjà, lors du dernier match face au Real Madrid, Verratti se blesse et Rabiot prend sa place pour ce qui était un de ses premiers matchs référence d’ailleurs. Et puis le carton rouge de Zlatan à Chelsea, la blessure de Thiago Silva l’année dernière, Thiago Motta… Ce serait bien d’arriver avec un groupe complet pour une fois !

En tout cas, beaucoup sont sceptiques, notamment à cause du match retour face au Bayern (perdu 3-1, ndlr). Est-ce que tu penses que ce match peut toucher la confiance des joueurs ?

A.G : Non. Ça aurait pu s’ils avaient tout misé dessus. Là, les joueurs n’ont pas abordé ce match de cette manière, la première place était acquise, il sortait d’une campagne exceptionnelle avec un record de buts... Mais on ne peut pas tirer de conclusion sur un match, si on le fait là, pourquoi ne pourrait-on pas le faire sur le match aller (gagné 3-0, ndlr) ? On a voulu banaliser cette performance, banalisons la défaite face au Bayern… Je trouve que les réactions sont excessives quand il s’agit du PSG. Le club a le standing, les recrues, l’argent, il prend les joueurs que les clubs ne veulent pas perdre… Pour tout ça, il n’a pas le droit à la moindre erreur. Pourtant, le Milan de Sacchi, le Barça de Guardiola, le Real de Zidane ont aussi perdu des matchs. Ce n’était pas la fin du monde, le coach n’était pas remis en question. Là, tout est exagéré.

A entendre ces critiques, on a l’impression que le club n’avance pas. Est-ce que, selon toi, l'équipe a progressé ?

A.G : Oui, dans le discours des joueurs déjà. L’année dernière, les joueurs n’ont pas directement adhéré au discours d’Emery, ils ont mis du temps à comprendre ce qu’il voulait. Là, on les sent derrière lui à l’image des réactions après le match du Bayern et ça c’est nouveau. C’est un virage à 180 degrés, on a vu, par exemple, Verratti dire qu’ils voulaient gagner avec ce coach. On sent que les cadres adhèrent. Ensuite, dans le jeu, le PSG est encore en construction. Il manque de l’équilibre, il manque de l’engagement de certains. Et puis, il faut reconstruire autour de Neymar. Après 7 ans, on en est toujours à ce stade, ce qui peut être difficilement compréhensible pour certains, mais ça commence à prendre. Malheureusement, il manque encore des choses, il manque chez certains joueurs l’exigence attendue par ce club ; elle ne semble pas avoir été comprise par tous.

Malgré tout, on observe des changements positifs. Par exemple, l’apport de Draxler au milieu. Est-ce que ça peut être la formule optimale ?

A.G : Bonne question, je suis sûr que toi-même tu n’arrives pas à y répondre ! Ça dépend de l’adversité. C’est vrai que certains choix d’Emery sont discutables mais mettre Draxler à ce poste est une vraie trouvaille, à défaut d’avoir une place dans le trio offensif qui semble intouchable. Et puis Rabiot est une belle surprise en sentinelle. Par contre, cette solution a ses limites lorsqu’on joue avec une équipe qui tient le ballon. Par ailleurs, Thiago Motta a ses qualités, que d’autres n’ont pas, c’est un vrai numéro 6 et il a le mental pour les grands matchs. Le PSG n’a pas encore trouvé la formule idéale, ça va aussi dépendre du mercato. Ce qui est sûr c’est que l’équilibre on ne le trouve pas quand on change trop souvent. C’est trop facile de juger les entrants (Pastore, Lo Celso…) quand ça change tout le temps. Les automatismes ne sont pas là. D’un autre côté, l’avantage c’est qu’il y a beaucoup de joueurs polyvalents.

Justement, pour parler d’Emery, est-ce que pour toi il reste l’homme de la situation ?

A.G : Question difficile. Il est arrivé sans avoir les épaules pour être le coach du PSG. Il apprend aussi un nouveau métier avec les nouvelles exigences d’un grand club, la pression, la rotation qu’il doit mettre en place vu le nombre de grands joueurs, le management… Il a mis du temps à mobiliser son équipe mais ça prend. S’il fallait le condamner, ça aurait dû se faire après le Barça mais quitte à l’avoir maintenu, il faut le soutenir. Si le PSG doit aller loin, ce sera avec lui. Parler de son départ en pleine saison ça n’a pas de sens.

Il est très critiqué en France, notamment pour sa gestion du groupe. Est-ce qu’il a la main sur ses joueurs ?

A.G : C’est difficile à évaluer, il montre des failles. Il est le symbole de l’équipe, elle a peur de ce qu’elle est et de son statut à assumer. Avec un tel effectif, difficile d’avoir l’ascendant sur tout le monde. D’autres coach l’ont vécu, Ancelotti perdait les pédales avec Ibra car il n’avait pas l’ascendant sur lui. Zidane l’a parce qu’il a une aura et une histoire au club. Mourinho, aussi grand coach est-il ne l’a pas non plus, Guardiola au Barça pareil. Emery est très nerveux, on lui reproche mais bizarrement pas à Simeone qui incarne la même chose. C’est un coach passionné, la question c’est : est-ce qu’on le suit dans cet amour du foot ou on s’en désengage ? S’il gagnait tout, on crierait au génie.

Tu le disais, certains joueurs n’affiche pas l’exigence attendue par le club et Emery ne semble pas réussir à leur inculquer, à l’image de Kurzawa par exemple. Ton sentiment sur lui ?

A.G : Je ne cache pas mon impatience vis-à-vis de lui, on l’attend toujours... Il est venu de Monaco avec un talent, j’imagine que c’est dur pour lui. C’est un très bon joueur mais il n’a pas le niveau du PSG. Quand tu as Maxwell qui est un exemple de professionnalisme, de rigueur, de concentration… ce sont les qualités qui manquent à Kurzawa. Meunier disait récemment qu’il ne pouvait pas se plaindre car il a la chance d’évoluer dans un grand club, Kurzawa ne semble pas en avoir conscience. Il pourrait être parmi les plus grands, mais il ne fait rien pour. Il fait défaut à cette équipe et met aussi ses partenaires en difficultés. Après son triplé, il a directement pensé à faire un chut. On attendait plus d’humilité de sa part, du coup il est encore plus attendu au tournant. C’est quelque chose qu’on a tendance à ne pas aimer en France et à reprocher au PSG. Il est arrogant mais n’a pas ce qu’il faut derrière. Ibra était arrogant mais avait les stats pour l’assumer. Il doit continuer à travailler, s’il la ramène en étant bon, je serai la première à le reconnaitre.

Et concernant le poste de gardien, est-ce qu’on est suffisamment armé ?

A.G : Je suis très partagée sur ce dossier. Il y a l’affect et la réalité sportive. Trapp est le Sirigu d’aujourd’hui, il est toujours au rendez-vous et a une bonne mentalité. Aréola est le titi parisien qui a gravi les échelons un à un, a été prêté puis a subi la concurrence avec Trapp en étant logé, délogé, relogé etc… pour enfin réussir à s’imposer. Difficile de les mettre au placard. Ensuite, sur la réalité sportive, il y a l’exigence du PSG. Si une brèche s’ouvre avec un Oblak, un Courtois, il faut y aller. Si c’est pour chercher un gardien non confirmé dans un club qui ne joue pas les grands rôles, ça ne sert à rien. Si c’est un top 5 mondial, c’est évidemment un grand oui.

Enfin, pour finir, on est obligé d’évoquer ton joueur fétiche, Javier Pastore… Question cruelle : doit-il rester ou partir ?

A.G : La question la plus difficile de l’histoire de ma vie… C’est comme être avec quelqu’un, savoir que l'histoire touche à sa fin, et se demander si la personne doit être malheureuse avec soi ou heureuse loin de soi. On a envie qu’elle reste avec nous même si on sait qu’elle sera plus heureuse ailleurs. C’est le même sentiment que j’ai pour Javier… J’ai envie de tout faire pour qu'il reste, de monter des cagnottes, d’alpaguer Emery, de brûler son dossard de remplaçant… Après il y a la réalité du terrain, les objectifs du club, l’équilibre de l’équipe. Aujourd’hui Pastore, n’y est pas. A mes yeux, il a le talent pour jouer dans n’importe quel club mais n’a pas la constance. Est-ce qu’on le préfère sur le terrain ailleurs ou inconstant ici ? Difficile. Pour moi, il a l’ADN du club, c’est un créateur, un amoureux de la capitale, il fait des étincelles à chaque toucher de balle, c’est ce qu’on aime à Paris, c’est vibrer, on a eu des Ronaldinho, Susic, Valdo… Se passer de ça serait perdre l’ADN du PSG, à mon sens, c’est lui qu’il l’incarne le mieux, et j’ai le cœur qui bat en disant ça…

 

Propos recueillis par Nabil (@Nabil_paristeam)