El Pais: l'interview croustillante d'Emery

Publié le : 29/11/2016 - 04:15 - Dernière modification : 29/11/2016 - 11:06

L'entraîneur du PSG Unaï Emery a donné un interview croustillante dans le média espagnol El Pais. Pour vous faire partager ses confidences, nous avons traduit l'intégralité de ses propos où il explique son PSG et donne certainement son plus bel entretien depuis son arrivée à Paris.

Le PSG est programmé pour gagner la LDC. Le projet est très difficile, comment travaillez vous ?

Unaï Emery : En France, ils te diront que vous devez gagner la LDC, car ils supposent déjà que la Ligue 1 est acquise. Or j'insiste sur la difficulté de remporter le championnat, on l'a vu par exemple avec Carlo Ancelotti, ils ne l'ont pas gagné, c'était Montpellier. Ensuite, on veut faire quelque chose de grand dans la LDC, ils veulent que le PSG soit connu dans le monde, comme une grande équipe.

Il y a des délais pour gagner la LDC, comment penser vous les respecter ? On a été vous chercher, car vous avez gagné 3 Ligue Europa, pensez-vous changer la philosophie de jeu ?

J'ai demandé à Al-Khelaifi " Pourquoi moi ? ", " Que cherchez-vous avec moi ?" Il m'a dit "Tu es déjà un gagnant, vous avez le gène d'un gagnant et nous sommes une équipe gagnante, mais nous avons besoin d'améliorer quelques détails, on ne peut pas tout changer dans l'équipe"

Quels changements avez-vous introduits par rapport à l'année dernière ?

Fondamentalement, la force de l'équipe est déjà ce qu'elle avait l'année dernière. Seulement Ibra, qui était important et imposait son leadership est parti. Nous voulons compléter l'équipe avec d'autres joueurs, mais l'équipe reste la même. Une possession de balle, la supériorité, ce sont des joueurs mondiaux. Quels changements je veux faire ? Je veux travailler les détails tactiques et la mentalité que j'ai transmise à Séville. Il faut toujours regarder le but adverse, améliorer la pression défensive, la défense est un peu plus prioritaire. Mais globalement le style général ne change pas.

Matuidi est-il votre nouveau Iborra ?

Il y a certains types de joueurs qui ne restent pas en place. Pq? En raison de ses caractéristiques, il aime courir. Et s'il doit courir, je le laisse courir vers le but adverse. Nous devons travailler à courir vers l'avant, mais également avoir de l'équilibre, plus de patience. Mais Matuidi est l'exception. Le PSG est fait de plusieurs jeux de position, c’est aussi un défi pour moi.

Pourquoi ?

Parce que nous devons obtenir un meilleur regard sur le but adverse. Avec la possession. Il y a des joueurs très spécifiques comme Verratti. Il aime jouer au ballon, toucher beaucoup le ballon. Mon objectif est de mettre en oeuvre ces détails. Verratti doit être en mesure de jouer la possession, tout en regardant le but adverse. En son temps, il fait du Iniesta. Et avant du Xavi. Il faut qu'il marque plus aussi, mon travail est de lui apprendre cela, certains joueurs apprennent ici.

Ventura, le sélectionneur de l'Italie préfère Marchisio, Verratti est-il vraiment le grand joueur qu'on annonce ? Votre relation avec lui est-elle aussi difficile que la presse française le dit ?

C'est un jeune joueur, très impulsif, ce qui le rend bon footballeur. Il donne beaucoup de coeur. Contre Rennes, a la 85e, il était très proche de mettre un doublé sur une passe de Di Maria. Il faut qu'il joue avec la possession, regarde le but adverse et quand nous n'avons pas la balle, essayer de la récupérer. Il a tous ces concepts de jeu. On ne le laissera pas partir même si le Real Madrid, le Barca ou le Bayern Munich vient. Avec Marquinhos c'est l'âme du PSG.

Marquinhos est aussi convoité par le Barca ou Madrid...

C'est un top footballeur, et il veut vivre pleins de bons moments. Outre ses qualités techniques, il écoute les consignes. Il est très concentré, il fait ce qu'on lui demande, il peut encore s'améliorer en matière de leadership. Marquinhos a une attitude standard, ce n'est pas le genre de joueur à venir nous demander "Monsieur qu'est ce qu'il faut faire?". Le Barca a bien demandé à l'avoir cet été, mais il est reconnaissant envers le PSG qui lui a donné l'opportunité de jouer dans un grand club. Il pourrait aimer jouer pour Barcelone, mais il respecte ce que lui a donné le PSG. Cela dit, c'est un joueur complet.

Cavani peut-il remplacer Ibra ?

L'une des premières choses qui m'a marqué quand je suis arrivé, c'est cette discussion avec Cavani au téléphone et il m'a dit "J'aime le foot". Quand un joueur vous dit cela, vous devez avoir du respect. Certes, il y a des joueurs qui disent qu'ils aiment le foot, mais Cavani en fait la démonstration. Je n'oublie pas cette phrase. Les années précédentes, il était dans l'ombre de Ibrahimovic, il jouait sur le côté. Il a la possibilité maintenant de jouer devant, pour moi il en est capable. Nous devons lui donner toute notre confiance. Il se crée de nombreuses occasions, il marque beaucoup de buts. Je lui dis souvent : " Edi, nous devons être humble dans une équipe comme le PSG, tu ne dois pas l'oublier tu peux faire plus". Je suis optimiste avec lui.

Vous dites que vous ne voulez pas changer le style du PSG, mais parfois les joueurs ont été très précaires.Qu'avez-vous pensez des piètres performances des premières semaines de championnat ?

C’est tout un processus. Cette équipe ne jouait jamais en contre-attaque, mais pourquoi pas ? Lorsque vous avez la possibilité de faire des contre-attaques, il faut attaquer ! Parfois vous allez jouer face à des adversaires qui jouent haut sur le terrain, et il faut contre-attaquer. On ne peut pas se détourner de cela. Au début quand je parlais, les joueurs croyaient que je jouais seulement qu'en contre-attaque alors que non.

Que faites vous alors ?

Je joue. Par exemple la façon dont nous avons joué a la maison face à Rennes (4-0). On a joué avec la possession et le bon positionnement des joueurs, en regardant le but adverse pendant 90 min. À partir de la, quand vous n'avez pas le ballon, il faut créer un état d'esprit.

Vous n'avez pas l'impression que la méthode dans le football français est étrange? La force physique ne prend pas le dessus sur le jeu tactique ?

La culture de jeu de la France est individuelle. Le joueur se dit "je fais mon truc". En France tout tend à des duels individuels, et puis pour récupérer la balle tout le monde fait les mêmes mouvements. Nous devons apprendre à mieux jouer !

L'entraineur doit-il s'adapter à cela, à cette culture ?

L'entraineur doit avoir une équipe compétitive. Je suis monté avec Lorca, Almeria et Valence où nous nous sommes qualifiés pour la LDC a 3 reprises. Dans ma dernière année à Valence, j'ai fait un livre " Mentalité gagnante". Tous mes détracteurs à Valence me disaient "Mais tu n'as rien gagner!" Même s’il n’y a pas la victoire, j'ai la mentalité de la gagne, je suis toujours à la recherche d'améliorer mes joueurs. Maintenant je vais faire un deuxième livre : "Mentalité concurrente". J’ai appris le plus à Séville, comment devenir meilleur. Il faut démontrer une opposition de qualité, je devais changer le style de l'équipe. Par exemple, Tata Martino est partie au Barça mais il ne comprenait rien au jeu du FC Barcelone. Tout le monde ne peut pas entrainer au Barça, connaitre la structure du jeu, et puis s'adapter a Messi.

Ne sentez-vous pas que votre profil ne correspond pas au PSG ? Vous ne serez pas plus à l'aise dans une Juve ou à Chelsea, vu vos gestes, etc ?

De la même façon, je me suis adapté à toutes mes équipes, alors je m'adapte ici, il faut s'adapter au vestiaire, et les joueurs à l'entraineur. Comme à Lorca, beaucoup de joueurs étaient des amis de l'entraineur précédent, ils me regardaient avec méfiance, je devais gérer ce premier jour. J’ai dit " Je viens ici pour aider, je veux juste votre succès." Au PSG c’est pareil, je dois gagner, je dois gagner le coeur des joueurs. Je viens ici pour aider, pour travailler, et renforcer tous les talents qu'ils ont.

Quel est le joueur qui peut vous aider ?

Dans cette équipe, les joueurs ont beaucoup gagné. Ils sont les premiers à superviser l'entraineur. Je sais qu'ils me regardent de près. Je ne me soucie pas tant que ça de l'environnement. Je me soucie de l'interne, d'avoir de la crédibilité auprès des joueurs. Pour eux, je suis un enseignant. Voilà mon défi. J'apprends à connaitre un grand nombre de joueurs, je travaille pour essayer de les améliorer. Je vois le jeu 12 fois, car nous sommes 4 techniciens, tout le monde voit le jeu et nous analysons les entrainements 3 ou 4 fois. Enfin je sélectionne des images pour les montrer aux joueurs. C'est plus de 50% de ce qu'il se passe dans un match. Beaucoup de gens dans les gradins semblent meilleurs footballeurs que moi, mais moi je gère et travail pour avoir le plus d'informations, et je donne ces infos aux joueurs.

Vous préférez jouer sur les ailes avec Lucas et Di Maria ainsi que les latéraux comme Aurier ?

Il faut aller de l'extérieur à l'intérieur. Guardiola par exemple, a dit que les joueurs de côtés doivent courir toujours 80 mètres pendant les 90 minutes, mais cela est très très difficile, car le joueur sera cramé à la fin. C’est vrai qu'il utilise beaucoup les côtés avec Zabaleta, mais il utilise aussi une autre variante tactique. Du jeu de possession, avec beaucoup de mouvements des joueurs. Il faut que les joueurs de côtés soient efficaces et ne pas être trop cramé à la fin du match.

Traduit et retranscrit par Paristeam avec un remarquable travail de Mayman.